Dîtes aux loups que je suis chez moi

par Electra
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Ce livre tournait pas mal sur la blogosphère et le billet enjoué d’Eva aura eu fini de me convaincre. Une lecture hors de mon programme et surtout un achat à la clé ! Mais aucun regret. Pour ceux qui n’auraient par hasard aucune connaissance du pitch, voici la présentation de l’éditeur :

Nous sommes au milieu des années 1980, aux États-Unis. June est une adolescente taciturne, écrasée par une sœur aînée histrionique et des parents aussi absents qu’ennuyeux. Depuis sa banlieue triste du New Jersey, elle rêve d’art et de son oncle Finn, un peintre new-yorkais reconnu. Mais Finn est très affaibli et meurt bientôt de cette maladie qu’on n’évoque qu’à demi-mot, le sida. Inconsolable, la jeune fille se lie d’amitié avec un homme étrange, Toby, qui se présente comme l’ami de Finn. Confrontée à l’incompréhension de son entourage, et à la réalité d’une maladie encore honteuse, June va brusquement basculer dans le monde des adultes et son hypocrisie. Chronique des années sida vues par les yeux d’une adolescente,

Carol Rifka Brunt est née aux États-Unis et vit aujourd’hui en Grande-Bretagne. Dites aux loups que je suis chez moi est son premier roman. Oui, encore un premier roman pour moi. Je dois mettre un bémol à cette présentation : si le point de départ de l’histoire est le décès du sida de l’oncle de June, Finn , je trouve que le roman se concentre plus sur la sororité que sur cette époque et la maladie.  Le véritable fil conducteur de l’intrigue est l’histoire de ces deux sœurs qui se sont tant aimées puis au fil des ans se sont éloignées l’une de l’autre, au point de passer leur temps à se chamailler. La mort de cet oncle, parrain très investi auprès de June, va rouvrir ici les rancœurs  – n’est-il pas à l’origine de cette rupture ? Car en filigrane, on découvre ici que June, l’héroïne du roman, s’était tellement investie dans cette relation au point d’en oublier qu’il était simplement son oncle, et d’en oublier sa famille ou même d’ouvrir les yeux sur cet homme. Comment a-t-elle pu ignorer l’existence du compagnon de Finn ? De la détresse de sa sœur ? En ça, la romancière sait traiter avec talent de l’adolescence où l’on pense surtout à soi et où l’ouverture aux autres est un passage obligé mais difficile.

C’est bien l’aspect roman d’apprentissage qui m’a plu ici. June va être amenée, même contrainte, à ouvrir les yeux sur le monde – le sien, sa famille – découvrir ici ses parents en tant que personne, voir sa mère en tant que sœur et pas uniquement en tant que parents, et elle va voir l’image de sa propre sœur se briser… et les désillusions s’enchainer mais aussi l’amour réapparaître. June a 14 ans – une adolescente qui a volé en partie mon cœur. Car malgré tous ses défauts, comme au début du roman, ses déclarations peuvent sembler immatures (surtout sur sa sœur), elle va grandir sous nos yeux et va comprendre que oui, nous sommes tous faillibles, même nos parents et qu’elle-même n’a pas un comportement parfait. Et que nos actes ont des conséquences.

Elle m’a rappelé la jeune ado que j’étais, j’avais une assez haute opinion de moi-même à l’époque 😉

Les années 80 sont présentes mais ici c’est plutôt « cool » d’avoir un « oncle mort du sida » – assez étonnant quand je me souviens à quel point les personnes atteintes du sida ont été traitées. Le souci, c’est plus l’homosexualité de l’oncle et la relation qu’il avait avec sa sœur – on a le sentiment que les mêmes actes manqués se reproduisent à chaque génération et qu’il est temps de les briser.

C’est un premier roman qui a le don d’étudier à la loupe les relations intra familiales et qui réussit à pointer du doigt ces silences, ces non-dits, ces secrets qui viennent mettre à mal la famille. La romancière gratte le vernis, comme celui du portrait des deux sœurs, réalisés par leur oncle avant sa mort.

Au final, j’ai découvert un style fluide, plaisant et une auteur prometteuse, « à la plume sensible et puissante », même si j’ai ressenti à plusieurs reprises quelques longueurs et que je n’ai rien éprouvé pour l’oncle ou pour Toby, ce que je trouve fort dommage. Malgré tout, je n’hésiterai pas à lire son prochain roman.

♥♥♥

Éditions 10-18, Buchet-Chastel, Tell the Wolves I’m home, trad. Marie-Axelle de la Rochefoucauld, 504 pages. 

Photo by Tom Pottiger on Unsplash

Et pourquoi pas

21 commentaires

Fanny 14 septembre 2016 - 7 h 19 min

Je suis en plein dedans
Je trouve intéressant ce qui est raconté sur les descriptions de ces deux soeurs et leurs relations. Je n’arrive pas à le lâcher.

Electra 14 septembre 2016 - 7 h 24 min

Il est prenant ! Bonne fin de lecture !

Virginie 14 septembre 2016 - 7 h 22 min

Je me suis régalée avec ce bouquin quand il est sorti ! Je l’avais trouvé très réussi pour un « premier » et comme toi, je suis curieuse de lire ce que l’auteur écrira ensuite !

Electra 14 septembre 2016 - 7 h 24 min

Oui,encore un premier roman très prometteur ! ils font comment ??!! 🙂

keisha 14 septembre 2016 - 9 h 56 min

He non je ne connaissais pas ce roman (je suis dans le Henderson et ça va m’occuper un bout)(je viens de sortir de sa rencontre avec les rottweiler!)

Electra 14 septembre 2016 - 10 h 29 min

Marie-Claude a plus de mal avec le Henderson. Ah oui les rottweiler ! il n’en a pas fini..
sinon pour revenir à ce livre, il a fait pas mal de bruit sur les réseaux – un premier roman prometteur, comme tant d’autres !

EVA 14 septembre 2016 - 10 h 44 min

ah je suis contente de t’avoir donné envie de le lire! 🙂
je pense que tu as quand même des bémols et que tu l’as moins aimé que moi, mais oui, ce premier roman est très prometteur – j’apprécie les romans d’apprentissage qui mettent en scène des ados un peu décalés et solitaires, et j’ai aimé que l’art soit un fil conducteur qui rapproche les deux soeurs et qui recrée une unité familiale avec la mère…

Electra 14 septembre 2016 - 13 h 56 min

Oui quelques bémols mais je l’ai quand même bien aimé et lu très vite ! et puis pour un premier roman, j’aimerais faire aussi bien et comme toi le milieu de l’art est toujours très intéressant ! 😉

Jerome 14 septembre 2016 - 13 h 10 min

J’ai trop de lectures qui m’attendent pour en faire une priorité 😉

Electra 14 septembre 2016 - 13 h 55 min

ah bon ? moi j’ai une toute petite PàL … !!! 😉

Marie-Claude 14 septembre 2016 - 14 h 48 min

Tentant, quand même… Je le note, mais pour plus tard.
Là, je suis à fond dans le Henderson. Lecture faite de hauts et de bas, mais là, je suis dans le très haut! Bon signe!

Electra 14 septembre 2016 - 15 h 40 min

ah ! oui j’avais trouvé aussi un moment de flottement ou des longueurs mais ensuite j’étais de nouveau à fond ! je pense que celui-ci, Dites aux loups, te plairait beaucoup ! donc note-le 🙂

gambadou 14 septembre 2016 - 22 h 02 min

J’en avais entendu parler, puis oublié ! Merci de me le remettre en mémoire.

Electra 15 septembre 2016 - 9 h 31 min

De rien ! Parfois un livre m’échappe aussi .. !

LaRousse Bouquine 16 septembre 2016 - 15 h 37 min

J’avoue que pour ce livre la, j’ai fait mon gros mouton. Tout le monde disait qu’il est bien, donc je l’ai pris a Saint-Maur en Poche !
J’ai tres hate de pouvoir enfin le lire 🙂

Electra 16 septembre 2016 - 15 h 48 min

Moi j’ai lu l’avis enchanté d’Eva et je n’ai pas hésité fort longtemps non plus ! bonne lecture 🙂

quaidesproses 20 septembre 2016 - 16 h 39 min

Bon, il y a un je ne sais quoi de tentant… mouton, je vais suivre je le mets dans ma WL. (immense, WL)

Electra 20 septembre 2016 - 17 h 21 min

oh et si tu voyais la mienne ! Mais oui, il pourrait te plaire celui-ci 😉

noukette 22 septembre 2016 - 22 h 39 min

Plus d’excuse maintenant qu’il est en poche, je vais sûrement craquer !

Electra 23 septembre 2016 - 13 h 12 min

ah oui ! je me retiens d’aller en librairie car de nombreux Poche me tentent 😉

Carol Rifka Brunt Dites aux loups que je suis chez moi – Lettres exprès 29 septembre 2017 - 18 h 15 min

[…] Des exemple d’avis enthousiaste chez Eva ou Folavril, plus mitigé chez Electra. […]

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