Killers of the Flower Moon ∴ David Grann

par Electra
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Comme vous le savez déjà, j’ai une vraie passion pour tout ce qui touche autour de la Nation Indienne nord-américaine. C’est en lisant un article sur les meilleurs livres de « non fiction » (essais, biographies…) que j’ai découvert celui-ci. Entre temps, il a été présélectionné pour le Prix Pulitzer. Je savais qu’une fois reçu, je n’allais pas résister longtemps, il a donc rapidement rejoint ma valise.

David Grann est un journaliste et auteur célèbre depuis son dernier livre (La cité perdue de Z) que j’ai par ailleurs très envie de lire. L’auteur américain s’est penché sur l’histoire réelle de la tribu des Osage et d’une série de meurtres les visant, à l’époque où le FBI sortait tout doucement de l’imagination de certains hommes à Washington…

Dans les années 1920, les personnes les plus riches au monde étaient tous membres de la tribu indienne des Osage en Oklahoma. Cela peut paraître fou mais c’est absolument vrai.  Ils l’étaient devenus après que l’on ait découvert sur leurs terres le plus précieux des minerais : le pétrole.  Leur fortune fit rapidement la Une des journaux, ainsi il est avéré qu’ils possédaient en moyenne 11 véhicules (en 1920!) avec chauffeurs par famille. Rapidement ils firent construire des manoirs et envoyèrent leurs enfants étudier en Europe.

Mais soudainement leur rêve prit une autre tournure : un par un, ils furent assassinés. Méthodiquement.

La famille d’une femme Osage, Mollie Burkhart, fut la cible principale. Sa sœur, puis sa mère puis son autre sœur, son beau-frère furent assassinés. Mais ce n’était que le début, tous les autres membres de la tribu furent visés et on dénombra bientôt 24 assassinats.Il fallut attendre ce nombre éprouvant de victimes pour le que FBI prenne enfin les choses en main.

Cette enquête fut l’une des toutes premières de cette jeune police fédérale mais les enquêteurs qui n’avaient ni connaissance des lieux, ni de la culture indienne firent chou blanc. Le tout jeune directeur du FBI, J. Edgar Hoover décida alors d’engager un ancien Texas Ranger, Tom White. Celui-ci décida de composer une équipe, comportant le seul et unique agent du FBI indien et de les envoyer travailler sous couverture. Ils infiltrèrent la région et développèrent les premières techniques de ce genre d’investigation.  L’enquête allait s’avérer longe, compliquée et semée d’embûches (politiques, économiques et raciales) mais leur travail permit de dévoiler l’une des conspirations les plus effrayantes de l’histoire américaine.

Le livre de David Grann raconte non seulement l’histoire de ces meurtres, ainsi que l’enquête, mais aussi les procès et les condamnations. L’auteur a travaillé pendant plusieurs années sur ce projet, en collectant des centaines heures d’information, de documents et les témoignages des descendants des familles concernées, en particulier celle de Mollie Burkhart (cf. photo à la une).

J’ai dévoré ce livre ! Une lecture passionnante accompagnée de photos et de reproductions de certains documents. David Grann montre le racisme tenace qui frappait les Indiens et a permis à leurs meurtriers d’opérer des années sans être inquiétés.

 

Une enquête journalistique qui m’a beaucoup marquée car elle raconte aussi l’histoire d’une tribu méconnue aux USA – les Osage. Ces derniers furent choqués par la déportation des Cherokee (« the trail of tears, le sentier des larmes »). Le gouvernement américain les avait forcés à quitter leurs terres du Tennessee pour s’installer à des centaines de kilomètres. Leur voyage s’était déroulé pendant l’hiver, en plein blizzard, tuant des centaines d’entre eux. Lorsque Teddy Whashington envisage la même chose avec leur tribu, les Osage envoient l’un des leurs (un métis, qui à l’époque, chose rare, était éduqué) pour négocier le traité. Ce jeune homme aura l’esprit vif, puisqu’il fit écrire dans le traité que « seuls les membres de la Nation Osage seront bénéficiaires de toutes recettes provenant des terres qui leur sont octroyées« .

A l’époque, le Président ne s’était pas inquiété, les terres d’Oklahoma, arides, infertiles ne semblaient disposer d’aucune richesse. Il voulait s’assurer que ce peuple nomade et reconnu comme étant les plus grand guerriers des Plaines (les hommes dépassaient souvent les 2m) serait relégué dans une région peu accueillante, loin des terres fertiles le long des fleuves Mississippi et Ohio où la nation Osage vivait. Les Indiens quittèrent donc le Kansas pour l’Oklahoma. La chance voulut qu’au début du 20è Siècle, on y découvre la ressource la plus recherchée : le pétrole. Cette découverte fit venir des hommes blancs de toute l’Amérique, comme l’or à son époque, mais le traité était très clair : seuls les membres de la tribu pouvaient toucher les bénéfices.

Aussi, les hommes blancs épousèrent en grand nombre des femmes indiennes. Ce fut le cas de Mollie qui épousa K.Burkhart en seconde noces. Ils eurent plusieurs enfants, Mollie était très amoureuse. D’autres hommes blancs exploitaient les concessions en reversant une grandie partie des bénéfices aux membres de la tribu. Lorsque les premiers meurtre sont commis, on ignore le dessein des tueurs. Les victimes sont de tout âge et de tout sexe.  La première victime, la soeur de Mollie, était connue pour son alcoolisme et lorsque son corps est retrouvé mutilé plusieurs jours après sa disparition, on n’en fait peu cas. La prochaine victime est un jeune Indien qui cumulait des dettes de jeu. On pense à un suicide. Mais lorsque la famille de Mollie est de nouveau visée, la jeune femme comprend que quelque chose ne va pas. Tout au long du livre, David Grann cite la famille de Mollie et je me suis profondément attachée à cette femme qui a souffert énormément mais a toujours su garder sa dignité.

Tom White et son équipe vont avoir beaucoup de mal à enquêter et leurs témoins sont à leur tour assassinés.  Mais celui-ci aura à cœur de découvrir la vérité et d’amener devant un tribunal ces meurtriers, à une époque où le sort des Indiens intéresse très peu le peuple américain. Dans ce récit, l’auteur raconte en détail les techniques d’enquête de l’agent du FBI. En plus d’être une investigation passionnante, David Grann exprime l’angoisse de ce peuple, qui revit ici une nouvelle forme d’extermination.

J’admire le travail de David Grann, qui à la fin de son récit, revient sur son travail,  remercie les personnes qu’il a rencontré et rend un hommage appuyé à la grande Nation Indienne. Il mérite amplement sa sélection au Prix Pulitzer, et depuis j’ai acheté son livre.

Je n’ai qu’une chose à dire : un énorme coup de cœur ♥ Si vous parlez et lisez l’anglais, jetez-vous sur ce livre.

Édit : les francophones seront ravis d’apprendre qu’il est publié en français sous le titre « La note américaine » depuis le 8 mars au prix de 22 € aux Éditions Globe.

♥♥♥♥♥

 Éditions Doubleday, 2017, 352 pages

Et pourquoi pas

18 commentaires

Virginie 8 décembre 2017 - 7 h 54 min

Ça a l’air fascinant !! pourvu qu’il soit traduit, ça me dirait bien de le lire mais je n’ai pas ton niveau en anglais !

Electra 8 décembre 2017 - 11 h 57 min

Le niveau d’anglais n’est pas trop élevé (comparé par exemple à The Clay Girl) – mais oui, j’espère bien qu’il va trouver preneur ! Son premier livre a été traduit, donc normalement il a un agent en France…. je vais lui poser la question 😉

keisha 8 décembre 2017 - 8 h 10 min

Ah oui tu l’as lu en anglais (ce qui n’est pas gênant, tu sais que je lis en VO, pas trop vite, mais ça arrive, c’est l’oral qui pêche)
Figure toi que ce livre va paraître au premier trimestre 2018 aux (excellentes) éditions Globe sous le titre La note américaine (j’ignore pourquoi ce titre).

Electra 8 décembre 2017 - 11 h 58 min

trop drôle, tu réponds à la question de Virginie du coup ! Très bonne nouvelle. Je ne sais jamais où trouver ce genre d’info !

Mingh edwige 8 décembre 2017 - 10 h 06 min

Merci pour cette découverte Je lis en anglais et essaierais de me le procurer. Heureuse de voir que depuis quelques temps déjà les « mea culpa » fleurissent dans la littérature us !

Electra 8 décembre 2017 - 12 h 03 min

De rien ! Oui, ça bouge tout doucement. Il va être publié en français au 1er trimestre mais en anglais, il se lit aussi très bien ! Il donne un nom et un visage à ce peuple trop souvent oublié et met en lumière un évènement majeur vite enterré.

keisha 8 décembre 2017 - 14 h 20 min

Une agence me l’a proposé (parmi d’autres) et je n’ai pas résisté, je suis faible avec la non fiction et les états unis. J’espère le recevoir un de ces jours. Voilà pourquoi j’étais au courant.

Electra 8 décembre 2017 - 14 h 25 min

Ok ! au final, tu vas donc le lire en français 😉 chanceuse ! en tout cas, il est passionnant !

Marie-Claude 8 décembre 2017 - 14 h 31 min

Tu te doutes bien que je vais mettre la main sur cette « Note américaine » des éditions Globe !!! Hourra!

Electra 8 décembre 2017 - 17 h 00 min

Oui, je m’en doute bien ! Cela aurait très surprenant si tu m’avais répondu que tu n’étais pas du tout intéressée ….

Jackie Brown 8 décembre 2017 - 15 h 59 min

Heureusement que tu en as parlé, parce que la couverture ne m’inspirait pas du tout et je n’ai même pas essayé de savoir de quoi il s’agissait. Quelle erreur !

Electra 8 décembre 2017 - 17 h 03 min

Oh non ! Ouf, je suis ravie que tu m’aies lu alors ! Oui, on l’a beaucoup vu sur GR (là où je l’ai découvert et sur Book Riots) – oui la couverture peut en effet tromper le lecteur. Il est dans les finalistes de GR en non fiction – il mérite amplement tout le bruit autour de lui 🙂

jerome 10 décembre 2017 - 8 h 55 min

Très bonne nouvelle cette future publication en français ! J’ai hâte de le lire du coup, surtout après avoir lu ton billet. Tu es rarement aussi enthousiaste !

Electra 10 décembre 2017 - 8 h 57 min

Ah merci je l’ai emporté dans ma valise pourtant il était gros mais je sentais que j’allais adorer. Oui sa traduction est une excellente nouvelle !

Titezef 10 décembre 2017 - 16 h 33 min

Merci pour la découverte. De cette partie de l’histoire américaine je ne connais que les grands titres.
Il m’a l’air passionnant ce livre, surtout si c’est un essai c’est encore mieux.
Plus qu’à attendre sa traduction…En anglais,il me faudrait au moins une décennie pour le lire 🙂

Electra 10 décembre 2017 - 16 h 36 min

La traduction doit arriver au premier trimestre aux éditions Globe ! Mais ici le niveau d’anglais est bon, mais pas trop difficile (je ne recommanderai pas la lecture de The Clay par exemple qui est autrement difficile). Mais oui, c’est passionnant un essai qui se lit comme un thriller sur une partie de l’histoire américaine souvent mise de côté 🙂

chinouk 11 décembre 2017 - 13 h 13 min

j’allais pleurer de ne pas pouvoir lire ce livre… puis j’ai vu le commentaire de Keisha ! Yes Yes Et Yes !!

Electra 11 décembre 2017 - 13 h 14 min

J’ai ajouté un Édit en fin de billet ! Tu l’as pas vu ? oui bonne nouvelle

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