33 tours · David Chariandy

par Electra
4,2K vues

Lorsque le Caribou a débarqué à Paris avec sa valise pleine de livres, elle souhaitait absolument faire dédicacer son exemplaire du dernier roman de David Chariandy au Festival America. Elle avait beaucoup aimé son premier roman, moi je ne connaissais ni le nom, ni l’oeuvre de l’auteur et puis…

Le Caribou a du repartir dans sa contrée lointaine, et le dimanche j’ai eu la chance d’échanger avec l’auteur, sa vie à Vancouver mais son coeur toujours lié à Scarborough, dans la banlieue de Toronto. L’auteur était adorable, il m’a posé plein de questions sur l’accueil de son livre en France et sur la France. Du coup, j’ai craqué et acheté son livre. L’après-midi je l’ai retrouvé à la conférence sur « les exclus » et j’ai beaucoup aimé sa prestation.

Michael accepte d’héberger pour quelques jours la jolie Aisha, celle-ci est de retour à Scarborough, une des quartiers difficiles de la banlieue de Toronto, après le décès de son unique parent.  Il n’a prévenu Ruth, sa mère, dont il s’occupe et qui dort sur le canapé. Elle ne réalise la présence de cette jeune femme que le lendemain matin. Sa présence va bouleverser cette femme chamboulée par la vie, et va réveiller des souvenirs enfouis depuis longtemps.

Ruth a quitté l’ile de Trinidad pour offrir à ses fils, Francis et Michael une meilleure vie. Elle cumule les petits jobs (souvent femme de ménage) et rentre à la maison fatiguée et éreintée par cette vie de dur labeur. Leur père a quitté leur mère une fois installés au Canada. Les deux garçons prennent soin de leur mère, ils font les courses, le ménage, lui préparent son repas. La famille est pauvre mais unie. Ruth espère que ses fils auront une meilleure vie et mise sur leurs excellentes notes.  Mais si Michael est un excellent élève, Francis commence à sortir le soir et à  fréquenter des garçons de mauvaise influence. Sa mère tente de lui faire changer de trajectoire mais le pouvoir de la rue est trop fort, et un jour Francis claque la porte. Il continue cependant à apporter à manger.

Derrière lui, il laisse son petit frère qui a toujours beaucoup compté sur sa protection. En effet, Michael n’a rien du petit voyou, il est fluet, passe son temps dans les livres et est souvent pris pour cible par les autres gamins du quartier. L’été de 1991 est chaud et le soir, la tension monte dans ce quartier … La vie de Michael et de Francis va alors basculer.

Quel beau roman ! Empreint d’une douceur et d’une nostalgie uniques, il m’a totalement charmé. J’aime la manière dont l’auteur se souvient de son enfance, du parfum de la nourriture que sa mère cuisinait, des chansons qu’elle leur chantait, de ces moments intimes qu’ils partageaient. Leur famille était si unie malgré leur vie précaire. Et puis, on sait que quelque chose de terrible va arriver, mais l’auteur l’amène d’une manière subtile et intelligente. On ne peut que ressentir de l’empathie pour tous les personnages, même dix ans après les faits. J’aime la manière dont Michael, une fois adulte, va devoir revoir préjugés envers le meilleur ami de son frère, ou passer par-dessus sa crainte de « réveiller de douloureux souvenirs » à sa mère. Cette femme, brisée, va au contraire revivre en entendant à nouveau le prénom de son fils ainé.

Un très joli roman qui m’a totalement séduit. L’auteur a une sublime écriture, presque poétique. Elle me fait penser à une douce musique qui vous apporter une forme de sérénité. Une très jolie découverte que cet auteur canadien anglophone.

♥♥♥♥♥

Editions Zoé, 2018, Brother, trad. Christine Raguet, 174 pages

Et pourquoi pas

10 commentaires

Fanny 30 octobre 2018 - 20 h 02 min

J’ai aussi beaucoup apprécié ce récit!
😉

Electra 31 octobre 2018 - 8 h 08 min

Oui, on va rarement du côté de Toronto et j’ai une pensé pour tes ces mères qui élèvent seules leurs enfants et sacrifient leurs vies

Marie-Claude 31 octobre 2018 - 2 h 53 min

Ben moi, je me contente de « Soucougnant »! « 33 tours » m’a ennuyé. J’ai l’impression que c’est la même histoire que celle de son premier roman, avec quelques ingrédients de changés! Bref, ravie que tu l’ai lu (et rencontré). Où sont tes petits coeurs appréciatifs?

Electra 31 octobre 2018 - 8 h 10 min

Contente toi de Soucougnant ! Je rigole parce que je n’ai pas lu son premier roman du coup moi j’ai beaucoup aimé 😉 Merci, j’ai adoré cette rencontre, c’est un homme charmant. Tu aurais beaucoup aimé ! Mes petits coeurs, merci du rappel, ils avaient réussi à se cacher !

Mes échappées livresques 1 novembre 2018 - 10 h 17 min

Lu à mon retour du festival America, il ne m’en reste pas grand chose aujourd’hui. J’ai aimé la plume et le récit mais il m’a manqué quelque chose pour être complètement emportée par l’histoire

Electra 1 novembre 2018 - 18 h 37 min

Je l’ai lu dans le train du retour – j’ai aimé également, je lui donne 3 coeurs car j’ai été touchée par l’histoire, la sensibilité de l’auteur – je m’en souviens encore très bien – même s’il n’a pas été un immense coup de coeur. Je viens d’apprendre que Mike Meyers vient du même quartier 😉

Autist Reading 1 novembre 2018 - 18 h 23 min

J’ai adoré ce roman que j’ai trouvé extrêmement touchant. Suite au billet de Marie-Claude, je me suis procuré « Soucougnant  » et je vais bien voir lequel des deux va remporter la palme chez moi 😉
https://theautistreading.blogspot.com/2018/09/brother-david-chariandy-33-tours-zoe-mcclelland.html

Electra 1 novembre 2018 - 18 h 37 min

ah curieuse d’avoir ton avis car Marie-Claude a du coup laisser tomber 33 tours ayant eu l’impression de lire le même roman !

Violette 3 novembre 2018 - 9 h 49 min

je ne connais pas du tout mais c’est tentant!

Electra 5 novembre 2018 - 7 h 10 min

C’est un très beau roman, très touchant – on est avec le protagoniste du début à la fin. Je le recommande 🙂

Les commentaires sont fermés