C’est au cours d’une virée en librairie avec une amie que mon regard a croisé ce roman. J’ai tout de suite noté le nom de famille, et j’ai su que l’autrice, Sladjana Nina PERKOVIĆ est bosnienne. Originaire de Banja Luka et que ce roman, son premier, a reçu une mention spéciale du Prix de littérature de l’Union Européenne. Comme vous le savez, l’un de mes dadas en littérature est la littérature en provenance d’Europe Centrale et de l’Est. Et pour avoir des attaches amicales en Bosnie-Herzégovine, je n’ai pas hésité une seconde.
L’une des critiques en quatrième de couverture indique « Une sortie de route décapante en terres balkaniques « . Et c’est exactement cela. Nous voici embarqué avec l’héroïne dans une vieille Golf pourrie pour aller assister à l’enterrement de la tante Stana. Stana s’est étouffée en mangeant un morceau de poulet. Sa mère envoie l’héroïne qui souffre de dépression depuis 2 ans, et vit enfermée dans sa chambre, assister à l’enterrement. Toute la famille s’y retrouve, non pas pour honorer la tante Stana, mais pour s’assurer que le terrain que possédait l’oncle et la tante sera bien mis en vente. Sa vente pourrait générer un joli butin.
S’il vous plaît, je ne veux pas que quiconque assiste à mon enterrement. Jetez-moi dans la terre, sans pope, sans famille proche ou élargie, sans amis, sans connaissances. Je ne veux personne. (..) Le mieux serait de me jeter tout simplement dans une rivière, que le courant m’emporte et que je me fasse dévorer par les poissons. Oui, c’est probablement la solution la plus simple et la plus rapide. Je déclare rédiger ce document en toute liberté de conscience et en pleine possession de mes moyens.
La jeune femme fait donc la route avec son cousin Stojan et à son arrivée, sous une pluie battante et dans la gadoue, comprend vite que rien ne va se passer comme prévu. Entre le tonton Loir accroché à sa bouteille de Koliva (eau-de-vie), la tante Mileba qui lance ses attaques contre toute sa famille, les pleureuses qui hurlent en suivant le cercueil, transporté bon gré et mal gré sur une charrue, l’enterrement tourne au cauchemar. L’arrivée du Pope et de la Popesse pour la cérémonie ne change pas la folie qui semble être s’emparer des convives. Certains veulent rejoindre la tante Stana dans la fosse, d’autres décident de se pendre .. C’est drôle, déjanté – la famille la plus tarée que l’on puisse imaginer. Mais étrangement, au milieu de cette folie ambiante, se dégage aussi une forme d’amour.J’ignore comment l’expliquer.
La narratrice a peur à tous les instants de finir sous les roues de la charrue, ou dans le fossé avec la golf ou tuée par la Popesse..La jeune femme n’a qu’une obsession : quitter cet endroit. Mais il faudra passer par le cochon grillé, la soupe aux poissons à vomir, la pluie battante, le coup de folie de l’oncle Radomir, l’hôpital, et bien d’autres autres écueils avant de trouver une solution… Un roman déjanté qui m’a fait sourire.
Un roman, vous l’aurez compris, décoiffant. Parfois, ça fait du bien !
♥♥♥
Editions Zulma, U Jarku, trad. Chloé Billon, 2024 , 272 pages
12 commentaires
Drôle, déjanté, décoiffant, c’est tout ce que j’aime. Et une autrice bosnienne en plus, voilà l’occasion d’élargir mes horizons littéraires. Merci pour la découverte !
oui ! de rien, et en version Poche en plus !
Fanja m’a pris mon commentaire! ^_^ Sauf que rien à la bibli (et beaucoup à lire quand même). je reste vigilante, on ne sait jamais.
oui, c’est la version Poche, sans doute bientôt en bouquinerie d’occasion ?
C’est clair qu’il y a de très belles découvertes à faire avec la littérature des pays de l’Est. J’ai l’impression que les auteurs traduits sont de plus en plus nombreux. Je n’en ai pas lu tant que ça, mais je suis souvent tombée sur des petits bijoux d’humour.
Oui, je suis ravie ! j’espère qu’il est traduit en anglais pour mon amie Bosnienne. On a encore pas mal de boulot mes les maisons d’édition ont apparemment saisi qu’il fallait aussi regarder de ce côté-là de l’Europe
Ca m’a l’air bien réjouissant !! Et ma médiathèque l’a, contrairement à celle de Keisha (j’ai une super médiathèque 🙂
Et rien à voir, mais j’ai lu mon Strout.. très belle découverte !
ah ah Keisha va être jalouse !!!! ah trop contente pour le Strout, enfin ! super, hâte de te lire 🙂
Ce côté déjanté devrait me plaire. C’est intrigant en tout cas.
oui, je pense que son regard détaché et son humour vont te plaire, tu ne diras pas non à un petit verre d’eau de vie local ?!
Me voici enfin sur ton blog (je te « vois » souvent sur des blogs amis) ! Petite question au passage : peut-on s’abonner ? (J’ai du mal à être régulière si je ne reçois pas les nouveaux articles dans ma messagerie…).
Dans le fossé était dans ma médiathèque et je me suis jetée dessus (première fois que je croise un roman bosnien!). Bon, j’ai été déçue pour ma part. Je m’attendais à plus de folie, un peu à la Ante Romic sans doute qui m’a beaucoup plus fait rire. L’humour, c’est tellement subjectif !
oui, ce n’est pas non plus à mourir de rire, je dois lire Ante Romic, je l’avais lu il y a très longtemps mais bizarrement je n’ai plus trop de souvenirs. Je lis beaucoup d’auteurs originaires des Balkans et j’ai encore une PAL bien conséquente qui m’attend !
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