Une pause BD, ça vous tente ?

par Electra
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Allez, soyez rassuré, je lis encore des BD, 3 nouvelles lectures pour vos yeux, mesdames, messieurs !

Adieu Kharkov – Mylène Demongeot – Bouilhac – Catel
♥♥♥

C’est par hasard que j’ai choisie cette bande-dessinée racontant la vie de la mère de l’actrice Mylène Demongeot, Klavdia Troubnikova.  En 1985, atteinte d’un cancer, cette dernière, accepte de raconter son enfance à Kharkov, en Urkraine, elle y est née en 1904, benjamine d’une famille de Russes blancs, puis son adolescence, la révolution bolchévique, la première guerre mondiale et sa jeunesse, de la Russie à la France, en passant par Singapour.

Klavdia, inséparable de sa soeur ainée, Sis, fait très vite tourner la tête des hommes avec sa beauté orientale. Lorsque la guerre éclate, les enfants sont séparés pendant plusieurs années de leurs parents, et vivent très pauvrement. Ils sont finalement réunis, et les filles ont obtenu, après moults discussions, d’aller à l’école, contre l’avis de leur mère. Leur père, un coureur de jupons, disparait régulièrement, au grand dam de leur mère, qui refuse d’avoir un autre enfant et risque sa vie en interrompant ses grossesses multiples. Malheureuse, elle refuse que sa fille benjamine quitte la maison pour épouser un jeune homme. Mais Klavdia rêve d’une autre vie et veut fuir son père qui a eu des gestes plus que déplacés envers elle. Enfin mariée, ils s’installent en Asie, à Singapour où elle pousse son jeune époux à partir s’installer en Amérique après avoir promis de le rejoindre. Enceinte, elle est contrainte d’attendre la naissance de son fils. Mais, Klavdia ne perd pas de temps et met le grapin sur un homme très fortuné, qui accepte de l’installer chez lui avec son fils. Lorsque son épouse rentre d’Europe, les deux femmes font connaissance. C’est à cette époque qu’elle entend parler de l’arrivée d’un homme d’affaires français très beau, Fred Demongeot. Klavdia décide qu’il sera son époux.

Dotée d’une volonté de fer, la mère de Mylène a ainsi décidé d’utiliser rapidement ses atouts féminins pour sortir de sa condition (la révolution bolchévique leur fit perdre leur situation bourgeoise). Et elle refuse le sort vouée aux femmes. Où elle m’impressionne, c’est qu’elle n’oublie jamais sa soeur (son frère a préféré resté à Kharkov avant de partir s’installer en Amérique en coupant les ponts).

Klavdia (Claudia en France) va réussir ainsi tout ce dont elle rêve, tandis que la grande Histoire s’emballe autour d’elle, mais à un prix extrêmement fort. Celui de l’amour.

La jeune femme va s’endurcir et il aura fallu qu’elle livre enfin ses secrets pour qu’elle et sa fille Mylène se rapprochent à la toute fin de sa vie.

Klavdia prend vie à travers les illustrations de Claire Bouilhac, alors que celle de Mylène est dessinée par Catel. Je n’avais pas remarqué ce choix illustratif.

Ces regards croisés de femmes, toutes deux émancipées, à plus de trente ans d’écart, sont passionnants. J’ai passé un très bon moment de lecture en découvrant ainsi la famille de Micha, surnom de Mylène Demongeot.

Une actrice que je ne connais que de nom, et pour sa fausse rivalité avec Brigitte Bardot. Pourtant, elle a tourné dans plus de 70 films. En voyant des photos d’elle jeune, je peux imaginer aussi la beauté de Klavdia.

Editions Dupuy, 2015, 232 pages

 

L’été DiabolikTome 0 de Thierry Smolderen et Alexandre Clérisse
♥♥

C’est toujours dans le cadre du même Prix BD 2017 que j’ai reçu cette bande-dessinée, que j’ai croisée à plusieurs reprises sur la toile. Alexandre Clérisse est l’illustrateur et son travail m’a marqué, car il est rare de croiser ce coup de pinceau et surtout ce choix de couleurs. Très vives, elles vous accompagnent tout du long. A la fin, on apprend que l’artiste travaille sur ordinateur et sur Photoshop. Le résultat est un ensemble de couleurs vives (« mixeur graphique ») qui peuvent déranger certains, pour ma part, j’ai beaucoup aimé.

Quant à l’histoire ? Thierry Smolderen a choisi de nous ramener à l’été 1967 – où Antoine, 15 ans, va voir sa vie totalement chamboulée. Le jeune homme a une vie plutôt confortable. Son père, un scientifique de renommée internationale, l’aime beaucoup mais les deux hommes partagent peu de choses en commun. Antoine se fait un nouveau copain, tout en continuant de rêver d’une jeune fille, qu’il croise lors des bals organisés dans la station balnéaire. Il est aussi émoussé par une jeune femme américaine (ou anglaise) invitée chez les parents de son ami. Mais des faits troublants viennent perturber cet été idyllique.

L’auteur s’amuse à plonger le lecteur dans un roman d’espionnage – mais à la OSS 117 – non pas tant pour l’humour, que pour le style de ces années-là, les années 60 où le père d’Antoine ressemble à un James Bond – élancé, la cigarette à la lèvre, le tailleur parfait – et c’est assez amusant. Ajoutez-y un accident dramatique, une fille troublante et la disparition soudaine du père d’Antoine, et vous avez une idée de l’histoire.

Mais j’avoue que j’ai quand même trouvé le scénario un peu trop creux, et surtout trop de références piquées ci et là (« des Fumetti à David Hockney ») et une fin un peu trop alambiquée pour moi ! En préparant ce billet, je découvre que Thierry Smolderen enseigne le scénario et l’histoire de la bande-dessinée, et qu’il a publié un ouvrage théorique intitulé « Naissances de la bande-dessinée ». Je comprends mieux le plaisir qu’il a en utilisant ses connaissances pour y insérer des références à ses auteurs préférés, mais chez moi, cela se traduit par un scénario un peu trop alambiqué. Mais  la plupart des gens autour de moi ont adoré. Je retiens surtout le coup de pinceau de Clérisse.

Cette bande-dessinée n’a pas besoin de moi, elle a déjà remporté deux prix (Quai des Bulles et Prix BD Fnac) et signe la deuxième collaboration des deux hommes, après « Souvenirs de l’empire de l’Atome » (2 prix dont celui des Utopiales en 2013).

Je vais essayer de me procurer celle-ci !

Éditions Dargaud, 2016, 168 pages

 

 Malpasset, causes et effets d’une catastrophe de Corbeyran et Horne
♥♥♥♥

Le 2 décembre 1959 à 21h13, après seulement 5 ans d’existence, le barrage de Malpasset, dans le Var s’est rompu. Une vague de 50 millions de mètres cubes d’eau s’est alors déversée dans la vallée du Reyran et s’est abattue 20′ plus tard sur la ville de Fréjus, causant des dégâts matériels considérables et faisant plus de 400 morts et 7 000 sinistrés. Il s’agit tout simplement de la catastrophe civile la plus importante du 20ème Siècle en France. 2017 – moi lectrice française, assez bonne en histoire de France, avoue n’avoir jamais entendu parler de cette catastrophe, et vous ?

A travers une dizaine de récits très poignants, Corbeyran et Horne remontent le fil du temps, racontent cette nuit d’horreur, en tentant d’éclairer sur l’origine du drame (et l’enquête qui suivit) mais surtout abordent tout en pudeur et respect le traumatisme vécu par les survivants et qui continuent plus de cinquante ans après les faits à les poursuivre.

En premier lieu, impossible de ne pas penser au Tsunami de 2006 qui s’est abattu en Asie et a fait des milliers de victimes. Ici, les trombes d’eau se sont transformées en une vague de boue géante qui a tout emporté sur son passage. Le témoignage d’Yvon (si je ne me trompe pas) est très marquant. Âgé de 16 ans, le jeune homme était parti s’amuser en ville (en contrebas) le soir-même. Lorsque le barrage a rompu, le bruit a été tel (les survivants parlent d’un bruit de dizaines de trains arrivant à toute vitesse), le jeune homme et son copain ont sauté sur leur scooter et ont filé toute vitesse rejoindre leurs maisons. La maison de son ami (et sa famille) avait survécu miraculeusement mais lorsqu’ils arrivèrent ensuite à la station service où vivait la famille d’Yvon (sa mère, son père et ses deux sœurs), il ne restait absolument plus rien. Rien. Ni station service, ni même de cuves souterraines d’essence ! L’eau avait tout emporté.

Les témoignages restent pourtant sobres – des familles entières ont disparu sous cette vague de boue. Les survivants racontent des histoires proches de celles entendues lors du tsunami asiatique – projetés, ballotés, blessés – souvent sauvés par un arbre ou une maison à étage (réfugiés sur le toit) – et surtout les visions d’horreur – entendre les cris, voir ses voisins, amis, parents disparaitre dans les flots.

Causes et effets – car il est important d’expliquer pourquoi ce barrage, fierté de la mairie communiste locale, n’a pas tenu plus de cinq ans. Des raisons économiques mais aussi des pressions locales. A la même époque, l’État construisait l’autoroute du sud – et le chef des TP publics avait obtenu que le barrage ne déverse pas les alluvions entassés naturellement au fond du barrage, comme il le faisait régulièrement via un sas prévu à cet effet. L’accumulation de ces alluvions au violent orage et aux chutes de pluie énormes qui étaient tombées la veille auront eu raison de l’ouvrage. En sachant qu’à l’époque, les études de sols réalisées avant les travaux (afin de connaître la nature du sol) avaient été fait en un premier lieu, qui ne fut finalement pas retenu pour la construction du barrage. On le construit 200 mètres plus loin et à l’époque, personne ne jugea bon d’étudier à nouveau le sol de la montagne.

 Editions Delcourt, 2014, 160 pages

Et pourquoi pas

12 commentaires

keisha 17 février 2017 - 8 h 45 min

Oh la catastrophe de Frejus, à moins d’avoir reconstitué un souvenir, j’en ai entendu parler dans mon enfance (mais j’aurais cru que c’était postérieur)
Quelle histoire, celle de la mère de M Demongeot!
Merci pour cet instant bD!

Electra 17 février 2017 - 8 h 58 min

De rien moi jamais entendu parler même au moment du tsunami en Asie. J’y ai repensé hier en votant les images du barrage en Californie qui menaçait de céder.

Fanny 17 février 2017 - 9 h 42 min

Les deux premières bandes dessinées ne me plaisent pas au niveau du dessin… j’aurais des difficultés à faire abstraction. Par contre, -la dernière me tente un peu plus.

Electra 17 février 2017 - 9 h 45 min

ah oui, moi aussi il m’arrive de passer mon chemin à cause du dessin 🙂

Eva 17 février 2017 - 10 h 25 min

je ne savais pas du tout que Mylène Demongeot avait des origines slaves (mais quand on le sait, cela semble évident au vu de son physique), cette BD me tente bien, cela a l’air d’être un « beau portrait de femme dans la tourmente de l’histoire »
Jamais entendu parler de la catastrophe de Fréjus, et cette BD a l’air également très intéressante!
merci pour ces coups de projecteur sur des ouvrages dont je n’avais pas entendu parler!

Electra 17 février 2017 - 10 h 33 min

Pareil que toi ! deux découvertes que ces BD ! ça me rassure de ne rien savoir de Fréjus, mais c’est quand même étrange .. je te conseille les deux ! Je vais toujours un peu au « pif » à la recherche de mes BD et pour l’instant, ça me réussit plutôt bien !

noukette 17 février 2017 - 12 h 28 min

J’ai beaucoup aimé L’été diabolik, elle a du pep’s cette BD !

Electra 17 février 2017 - 14 h 19 min

Oui, les couleurs sont tellement vivaces !

Anna 18 février 2017 - 20 h 01 min

j’aime bien quand tu nous fais une petite crise de bd avec 3 chroniques d’un coup ! Dans cette fournée, c’est clairement la 1ère qui me tente le plus pour la Russie et le croisement de petite et grande histoire. Le dessin m’emballe moins. Il fait un peu vieillot, non ? Mais tes 4 coeurs sur la 3e me font aussi découvrir une histoire que je ne connaissais pas du tout. Alors j’y jetterai un oeil si je la croise en librairie ou bibliothèque…

Electra 18 février 2017 - 21 h 11 min

En fait il y a 2 illustratrices une pour le passé de la mère de Mylène et l’autre pour Mylène. Pour le dernier, oui une histoire que je ne connaissais pas non plus. Prépare-toi a une autre chronique car j’en ai déniché 3 autres ce matin à la bibliothèque

jerome 21 février 2017 - 16 h 15 min

Tu me confirmes que l’été Diabolik n’est pas fait pour moi 😉

Electra 21 février 2017 - 17 h 11 min

ah ! Toi qui lis beaucoup de BD, je croyais que tu l’avais déjà lue au contraire 🙂

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