The Warden · Anthony Trollope (Chronicles of Barsetshire)

par Electra
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C’est en découvrant le challenge Victober et en suivant plusieurs booktubeuses anglophones que j’ai découvert l’existence d’Anthony Trollope et ses chroniques de Barchester. L’an dernier, le programme étant déjà bien chargé, j’avais choisi d’attendre l’édition 2020 pour lire le premier volume, The Warden (traduit tour à tour Le Directeur ou La Sinécure).

Et si vous me suivez sur Goodreads, vous aurez noté à quel point cette lecture fut ardue ! Pourtant, j’étais d’humeur et un roman de 212 pages me semble facilement lisible. Erreur de jugement. Je ne connaissais rien aux chroniques de Barchester mais tout le monde en parle toujours en très bien et j’avais donc hâte de partir à la rencontre de M. Harding, homme d’église et directeur de l’hospice. L’homme est heureux. Il est directeur depuis dix ans de l’hospice et se sait respecté. Après avoir marié sa fille ainée à l’archidiacre, il sait que sa deuxième fille, Nelly est amoureuse d’un jeune médecin, John Bold. Tout va pour le mieux jusqu’au jour où paraît un article incendiaire dans la presse l’accusant de percevoir l’argent destiné aux vieillards indigents abrités à l’hospice. Depuis dix ans en effet, M.Harding touche 800 livres de pension annuelle. L’église anglicane voit ainsi plusieurs hommes d’église attaqués sur le même motif dans toute l’Angleterre.

M.Harding, homme honnête et de bonne foi, a toujours eu confiance en l’évêque qui l’a nommé à ce poste et est effondré de voir que neuf des dix indigents exigent soudainement leurs dus, pensant gagner 100 livres par an. Jusqu’ici ils sont logés et nourris gratuitement, en échange de quelques services. Mais le plus grand choc vient lorsque M.Harding découvre que cette lutte pour une soi-disante justice est menée par M.Bold lui-même, son ami et le futur époux de sa propre fille !

La vie privée et la vie professionnelle du directeur sont étroitement liées. Ainsi sa fille ainée a épousé l’archidiacre, qui n’est autre que le fils de l’évêque, un ami très proche de M.Harding, son mentor. M.Harding est très éprouvé et sa fille totalement détruite par cette nouvelle tente de faire changer d’avis M.Bold… Sa fille ainée et son gendre quant à eux sont outrés, parlent de trahison et vont à Londres chercher soutien des plus hautes instances religieuses. Que l’église catholique soit accusée de vols, pourquoi pas mais l’église anglicane ? M.Harding le prend pour un affront personnel et sombre bientôt dans une forme de dépression.

L’histoire m’a plue mais son traitement moins. Je ne connaissais pas Anthony Trollope, et j’étais finalement plus habituée à ne lire que des autrices victoriennes et retrouver la plume masculine m’a parfois gênée. Car à l’époque (le livre a été publié en 1856), les hommes et les femmes avaient des rôles très précis à jouer en société et pour plusieurs personnages masculins, dont l’archidiocèse, les femmes étaient écervelées et ne devaient pas réfléchir. Sois belle et tais-toi. Plusieurs réflexions de ce style ont un peu heurté ma petite personne. Même si Trollope se moque de l’émotivité des hommes à un moment donné dans le roman. Reste que Bold fait de même avec sa soeur :

That’s woman logic, all over, Mary.

Mais ce que je reproche c’est que, contrairement à George Eliot, Anthony Trollope veut tout nous dire sur l’église Anglicane et sur chaque personnage, même plus que secondaire. Attention, s’il est très intéressant de comprendre le contexte, le fonctionnement de l’église anglicane, il reste que son livre se transforme en cours magistral. Lorsqu’il revient aux personnages et à leurs sentiments, le livre me plaisait à nouveau. Et c’est vrai qu’il y a de l’humour, mais pour moi il s’est fait trop rare (les « Good Heavens / Bons Dieux » de l’archidiacre) et j’attendais un peu plus de matière « humaine », de sentiments. J’ai aimé chaque moquerie, chaque défaut des personnages car Trollope écrit très bien mais cela n’a pas suffit. Et comme les femmes sont toujours réduites à leur sexe, cela a eu comme effet chez moi de ne pas ressentir de compassion envers elle.

Ainsi, il m’a manqué quelque chose tout au long de ma lecture. Enfin, je n’ai pas du tout compris les choix des personnages, que ce soit celui de M.Harding ou de sa fille. Je l’ai trouvée finalement mièvre et puis très pressée d’oublier son père pour épouser (désolée je spoile !) son M.Bold qui fait exactement ce qu’elle lui reprochait .. Bref, elle a eu vite fait de passer outre ses principes moraux. Quant à son père, il se résigne et laisse derrière lui périr un hospice accueillant et une paroisse vivante et généreuse… lui qui pourtant mettait un honneur à faire le bien. Sa vanité aura donc été plus forte.

J’ai fini ma lecture ce matin, heureusement les matinées de week-end sont toujours des moments où je peux lire énormément, mon esprit comme libéré. Je n’ai pas eu envie de retrouver Barchester la semaine dernière. Résultat : j’ai lu en dent de scies et 5 jours pour lire un roman de 212 pages..c’est une première ! Je ne pense pas retourner dans le comté de Barchester l’an prochain. Il me reste encore beaucoup d’autres auteurs et autrices à lire et à découvrir dans le cadre du challenge Victober.

Et j’espère avoir plus de succès avec ma dernière lecture !

♥♥(♥)

Editions Vintage, Classics, 2012, 212 pages

Et pourquoi pas

8 commentaires

Ingannmic 28 octobre 2020 - 10 h 48 min

« 5 jours pour lire un roman de 212 pages »… tu me fais rire ! (Il y en a qui lisent 200 pages par an !!)…. En tous cas, même si ce n’est pas une période qui m’attire particulièrement en littérature, je lis avec beaucoup d’intérêt tes billets sur cette participation au Victober, c’est très intéressant !

Electra 28 octobre 2020 - 19 h 08 min

Merci ! Oui, normalement je peux lire 200 pages d’une traite du coup pour moi ce fut une torture LOL Oui, j’aime beaucoup cette période, parfois on se rend compte que l’être humain n’évolue pas aussi vite qu’il le souhaite

keisha 28 octobre 2020 - 12 h 15 min

212 pages, en effet, alors que d’ordinaire il pond des pavés. j’en ai lu plusieurs, et c’est beaucoup plus marrant. On va dire que The warden, on évite. Mais ne laisse pas tomber l’auteur, il a écrit plus sympa.

Electra 28 octobre 2020 - 19 h 09 min

OK ! j’espère car je n’ai pas compris son succès, il y a des moments drôles comme les « good heavens » de l’archidiacre mais sinon … Allez, j’ai un an pour oublier cette mésaventure et repartir sur de bons pieds !!

Fabienne 28 octobre 2020 - 12 h 29 min

J’avais lu George Eliot à l’université et je me souviens avoir bien aimé mais je n’ai jamais lu Trollope. J’ai pris un peu de retard avec ton blog et tes billets Victober mais je vais me rattraper dans la journée!

Electra 28 octobre 2020 - 19 h 10 min

Merci ! Pas lu Eliot à l’université (beaucoup de Forster ..) et j’aime beaucoup. Pour Trollope, j’avoue que j’ai découvert son existence il y a peu. Du coup, Keisha me dit d’en lire d’autres – à voir donc !

mingh 28 octobre 2020 - 15 h 07 min

Je me souviens juste d’avoir lu un de ses romans sans avoir eu envie de continuer, à tort peut-être ! Ai vu par contre plusieurs épisodes des adaptations tv plus abordables que la lecture qui s’avère parfois ardue.Je privilégie plutôt George Eliot, ou le roman d’une écrivaine considérée comme mineure en regard, Mary Webb « Sarn » que je conseille vivement. Le téléfilm de Claude Santelli était remarquable …

Electra 28 octobre 2020 - 19 h 11 min

Je note ton autrice. Oui, je pense que Trollope ne révolutionne pas le genre. Je continue par contre avec George Eliot, j’ai toujours Middlemarch que j’ai trouvé parfait !!

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